Le président tunisien Kaïs Saïed a effectué une visite d’État de cinq jours en Chine du 28 mai au 1er juin 2024, à l’invitation du président chinois Xi Jinping.
Cette visite, coïncidant avec le 60e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Tunisie et la Chine, a permis aux deux dirigeants de renforcer leur coopération bilatérale.
Renforcement des relations bilatérales
Lors de cette visite historique, une séance de travail élargie a réuni le président Kaïs Saïed et le président Xi Jinping, accompagnés des délégations des deux pays.
Le président tunisien a exprimé sa gratitude envers son homologue chinois pour l’invitation, soulignant que cette visite renforcera les relations entre la Tunisie et la Chine, vieilles de six décennies.
Accords signés
Les deux présidents ont supervisé la signature de plusieurs accords de coopération, notamment :
- Un accord de coopération économique et technique ;
- Un protocole d’accord sur la création d’un groupe de travail sur l’investissement ;
- Un mémorandum d’accord sur le renforcement de la coopération au développement et la promotion de l’initiative mondiale de développement ;
- Un protocole d’accord dans le domaine du développement vert et bas carbone ;
- Des accords de coopération dans les domaines des médias et de la communication.
À l’issue d’entretiens fructueux, une déclaration conjointe a été publiée, annonçant l’établissement de relations de partenariat stratégique entre la Tunisie et la Chine.
Ce partenariat vise à approfondir la coopération dans divers domaines tels que l’économie, l’investissement, le développement durable et les échanges culturels et médiatiques.
Concurrence entre UE et Chine
Cette visite et les accords signés soulèvent la possibilité d’une concurrence accrue entre l’Union européenne (UE) et la Chine pour se positionner en Tunisie. Avec cette nouvelle dynamique, la Tunisie pourrait devenir un champ de compétition stratégique entre ces deux puissances.
La Chine, par ses multiples accords, cherche à renforcer sa présence économique et stratégique en Tunisie. L’engagement de la Chine dans des projets de développement économique et technique, ainsi que dans des initiatives de développement durable, démontre sa volonté de consolider ses relations avec la Tunisie et de s’assurer une position clé en Afrique du Nord.
Le port de Bizerte et la Chine
Le port de Bizerte, situé au cœur de la Méditerranée, contrôle le détroit de Sicile reliant la Méditerranée orientale à la Méditerranée occidentale. Cette position stratégique en fait un hub commercial crucial, facilitant les échanges entre l’Europe, l’Afrique et l’Asie.
La Chine a manifesté un intérêt particulier pour le développement d’un port en eau profonde à Bizerte, facilitant les échanges commerciaux entre l’Europe et l’Asie. Ce projet s’inscrit dans l’initiative des nouvelles routes de la soie, visant à renforcer les liens commerciaux de la Chine avec l’Europe et l’Afrique.
Des accords ont été signés entre la Tunisie et la Chine pour le développement du port de Bizerte, incluant un accord de coopération économique et technique, un protocole d’accord sur la création d’un groupe de travail sur l’investissement et un mémorandum d’accord sur le renforcement de la coopération au développement et la promotion de l’initiative mondiale de développement
Cependant, ce projet est également pris au cœur de la rivalité sino-américaine pour le contrôle des flux de données entre l’Asie et l’Europe. Les États-Unis cherchent à freiner la montée en puissance de ce port pour préserver leur influence dans la région.
Et le pont de Bizerte
Le pont de Bizerte est un projet d’infrastructure majeur visant à améliorer la connexion entre l’autoroute A4 et la ville de Bizerte.
La construction de ce pont a été confiée à la société chinoise Sichuan Road and Bridge Group (SRBG), qui a signé un contrat avec le ministère tunisien de l’Equipement et de l’Habitat en mars 2024.
Réponse de l’UE
L’Union européenne, partenaire traditionnel de la Tunisie, pourrait voir cette avancée chinoise comme un défi à son influence dans la région.
L’UE a historiquement été un soutien majeur à la Tunisie, offrant des aides économiques et techniques substantielles. La coopération stratégique entre la Tunisie et la Chine pourrait inciter l’UE à intensifier ses efforts pour maintenir et renforcer ses liens avec la Tunisie.
Accord historique
Lundi 27 mai 2024, un protocole d’accord significatif a été signé au Palais du Gouvernement à la Kasbah.
Cet accord, conclu entre le ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie de Tunisie, le groupe français Total Énergie et le groupe autrichien Verbund, marque le lancement d’un projet ambitieux de production d’hydrogène vert en Tunisie destiné à l’exportation vers l’Europe via des pipelines.
Un Projet de grande envergure
Le projet vise à produire initialement 200 000 tonnes d’hydrogène vert par an, avec une concentration de 5 000 mégawatts d’énergie renouvelable et 2 000 mégawatts d’électrolyse.
À terme, la capacité de production atteindra un million de tonnes d’hydrogène vert par an, grâce à 25 gigawatts d’énergies renouvelables. L’investissement nécessaire pour la première phase est estimé à environ 6 milliards d’euros (19,8 milliards de dinars), tandis que la phase finale, prévue pour 2050, représentera un investissement total de 40 milliards d’euros (132 milliards de dinars).
Équilibrer les relations
La Tunisie pourrait adopter une approche équilibrée, tirant parti des offres de coopération de la Chine tout en consolidant ses relations avec l’UE. En jouant sur cette concurrence, la Tunisie pourrait obtenir des avantages économiques et techniques significatifs, propulsant ainsi son développement dans divers secteurs.
La visite du président Kaïs Saïed en Chine marque une étape importante dans les relations tuniso-chinoises, ouvrant la voie à un partenariat stratégique renforcé. Cependant, cette nouvelle dynamique introduit également une concurrence potentielle entre l’UE et la Chine pour se positionner en Tunisie.
La manière dont la Tunisie gérera ces relations pourrait déterminer son avenir économique et politique dans les années à venir, offrant ainsi des opportunités uniques pour son développement tout en naviguant dans un paysage géopolitique complexe.
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