Jusqu’ici le business entre la France et l’Algérie était relativement épargné par les soubresauts diplomatiques, à part le blé français, qui a quasiment disparu du marché algérien. En novembre 2024 le Premier ministre algérien avait formellement démenti les mauvais bruits autour des importations et des exportations. L’annonce avait rassuré les investisseurs français, qui ont de gros intérêts sur le sol algérien. La dernière passe d’armes entre Paris et Alger, à coups d’expulsions de fonctionnaires et agents consulaires, rebat toutes les cartes. Le groupe français CMA CGM, un géant du transport maritime international, a fait les frais des tensions politico-diplomatiques.
On parle d’un projet en Algérie dont le financement monte à plusieurs milliards d’euros, il a été tout bonnement annulé. Les choses se sont gâtées après l’arrestation en France d’un agent consulaire et de deux ressortissants algériens dans une sombre affaire. Ce à quoi Alger a répliqué en expulsant 12 fonctionnaires français. Paris a riposté quelques heures après en renvoyant 12 agents du Consulat algérien et en rappelant son ambassadeur à Alger.
Le Conseil du Renouveau économique algérien (CREA) a fait savoir le 15 avril 2025 qu’il annule son voyage programmé en France et une rencontre de la plus haute importance avec le Mouvement des entreprises de France (MEDEF). Cette escalade s’est produite après que les autorités françaises ont déconseillé fortement au patron d’une entreprise française de transport maritime d’aller en Algérie pour matérialiser un investissement. Reste à savoir qui à Paris est à l’origine de ce développement.
Dans son communiqué le CREA s’en prend à l’attitude des autorités françaises, pointant «l’incohérence entre les déclarations officielles de normalisation des relations et les actions qui entravent les investissements privés en Algérie». Le patronat algérien a ajouté que «les mesures prises par la France vont à l’encontre des efforts de réciprocité et de respect mutuel qu’il appelle de ses vœux pour développer des partenariats internationaux».
L’un des projets impactés par cette tension était un investissement conséquent que le groupe français projetait de réaliser en Algérie. Le ténor du transport maritime avait programmé l’installation d’infrastructures portuaires modernes dans le pays, en faisant la part belle au port d’Oran, un hub stratégique majeur entre l’Europe et l’Afrique. D’après le journal “El Watan” CMA CGM était bien parti pour assurer la gestion complète d’un terminal dans ce port, afin de muscler son offre logistique et hausser ses investissements dans la région.
Le groupe français, qui opère dans 9 ports algériens (principalement Alger, Béjaïa, Annaba, Skikda et Ghazaouet), voulait grossir davantage dans le pays pour accroître son rayonnement régional. Il était question de bâtir des terminaux à conteneurs modernes et de nouvelles infrastructures pour doper le transport maritime. On parlait aussi d’une ligne maritime directe entre Marseille et Oran, pilotée par la filiale de CMA CGM, La Méridionale. Un investissement qui aurait débouché sur plus de 2000 emplois directs dans la région.
Finalement le CREA ne viendra pas France pour évoquer ce méga projet et d’autres. Les opérateurs des deux pays attendent les prochaines séquences diplomatiques, évoquées hier mercredi 16 avril par le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il avait abattu un important travail le 6 avril 2025 à Alger, tout est tombé à l’eau en moins de 10 jours. Mais les choses peuvent repartir aussi vite qu’elles se sont arrêtées, à condition que les deux exécutifs fassent taire les pyromanes.
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