L’automobile est la tête de gondole de l’industrie allemande, c’est ce qui a fait la fortune de la 1e économie européenne et 3e mondiale. A travers le monde qui ne connait pas Porsche, Audi, Mercedes, BMW et Volkswagen ? Mais voilà, les excédents commerciaux allemands de plusieurs centaines de millions d’euros qu’enviaient les autres pays européens – à commencer par la 2e de la classe et non moins rivale, la France – c’est terminé. L’automobile a fait les beaux jours de la puissante Allemagne, c’est elle qui a amorcé sa descente aux enfers.
La machine s’est détraquée quand la Chine a débarqué
Quand tout allait bien la voiture remorquait la florissante industrie métallurgique et tout le reste, la machine s’est grippée. Elle a commencé à se détraquer quand la Chine est montée en puissance, avec des véhicules dans l’air du temps – surtout l’électrique -, dopés par un rapport qualité prix imbattable. En dépit des hausses de taxe décrétées par l’Union européenne (UE) pour punir les subventions sur les voitures chinoises elles restent plus compétitives que tout ce qui se fait en Europe.
Ce qui nous dit le mieux la profonde déprime de automobile allemand ce sont les dizaines de milliers de suppressions de postes annoncées par les fabricants. Inutile de vous dire que dans ces conditions les portes du recrutement se ferment, et peut-être pour très longtemps, même pour les plus brillants jeunes diplômés. La “Frankfurter Allgemeine Zeitung” (FAZ) raconte le drame de ces compétences, qui n’étaient absolument pas préparées à ce cataclysme.
Le journal conservateur relate les tourments de Maurice, fraîchement sorti major de sa promotion de génie mécanique. Avec une telle distinction il pouvait s’attendre à dénicher rapidement un poste chez un gros constructeur, même en pleine crise. Que Nenni, le jeune homme enchaîne les réponses négatives à la place des promesses d’embauche…
Un changement violent pour ces jeunes qui ont opté pour “ces matières traditionnellement considérées comme un choix sûr pour ceux espérant des perspectives professionnelles stables et un bon revenu”, écrit FAZ. Rappelons que le fabricant historique, Volkswagen (VW), a officialisé fin octobre dernier le bruit qui courait : la disparition de dizaines de milliers d’emplois et la fermeture d’au moins 3 usines. Ce n’était jamais arrivé.
Quand on pense qu’il n’y a pas si longtemps – en juillet 2024 – les hauts cadres de VW bataillaient avec leur direction pour recevoir leurs Porsche, comme véhicules de service, en brandissant les bons résultats du groupe. Toutes ces coquetteries appartiennent au passé, le réveil est brutal. Ce n’est guère mieux chez l’américain Ford, qui projette de gommer 2900 emplois en Allemagne d’ici 2027.
Une funeste dynamique qui forcément impacte le tissu des sous-traitants du secteur, eux aussi trinquent et revoient tout à la baisse. En bout de chaîne ça frappe le marché de l’emploi. Une étude concoctée par l’institut Prognos, pour le compte par l’Union de l’industrie automobile (Verband der Automobilindustrie, VDA), a établi que 46 000 postes nets ont déjà été rayés des tablettes entre 2019 et 2023…
“Si cette tendance se poursuit, il pourrait y avoir, d’ici à 2035, 190 000 emplois en moins au sein de l’industrie automobile allemande par rapport à 2019”, lit-on dans la FAZ.
C’est un vent de panique qui souffle sur les universités, où le secteur automobile pesait lourd en termes de sécurité de l’emploi et rémunération substantielle. Anja Robert, directrice d’un centre d’accompagnement d’aide à l’insertion professionnel relevant de l’université d’Aix-la-Chapelle, admet qu’il y a un tournant majeur : “Même si l’économie évolue par nature de manière cyclique, les bouleversements que connaît actuellement l’Allemagne sont particulièrement profonds, notamment dans l’automobile, victime d’un véritable décrochage. Or ce secteur assure de nombreux emplois, directs ou indirects. Difficile de prédire comment les choses évolueront”.
Face à ces sombres perspectives beaucoup de jeunes diplômés songent sérieusement à changer de braquet. Maurice n’a pas encore fait une croix sur l’automobile, mais n’écarte pas l’idée de “tout arrêter et devenir moniteur de plongée en Indonésie”.
Les “trahisons” de Scholz ne le sauveront pas
Le chancelier allemand a tenté de conjurer le mauvais sort en allant en Chine en avril 2024 – son deuxième voyage – pour convaincre le président Xi Jinping de lui faire plus de place sur son immense marché. Certes les Chinois sont connus pour les freins qu’ils posent devant les produits étrangers, mais même si Pékin ouvrait davantage les Chinois aussi sont lestés par la crise et il y a une limite à ce que la classe la plus aisée peut absorber. Les cadres chinois adorent les berlines allemandes, mais ils aiment de plus en plus les véhicules locaux, qui montent en gamme et sont moins chers.
Reste les pays sud-américains. Berlin a poussé la Commission européenne pour signer l’accord avec le Mersocur (Argentine, Bolivie, Brésil, Paraguay, Uruguay). L’idée est de leur vendre tout ce que l’Allemagne ne peut plus écouler dans l’UE ou en Chine, principalement les voitures. Le texte a été paraphé, sur le dos de la France, mais ce n’est pas gagné. Comme tous les grands dossiers il faudra le vote des 27 Etats-membres de l’UE pour le valider…
On peut compter sur Paris pour savonner la planche de Scholz, politiquement et économiquement le président français ne peut pas se permettre de se louper. Le chancelier allemand est aussi très mal loti. Il a perdu son vote de confiance au Parlement et doit convoquer des élections anticipées dès février prochain, qu’il est certain de perdre à en croire les sondages.
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