Economie

Blanchiment d’argent et importations de produits turques, quel rapport ?

Partager

L’Observatoire tunisien de l’économie (OTE) a publié, fin 2019, une note qui a mis en relief l’importance de la lutte contre les flux financiers illicites (FFI) relatives au commerce extérieur, puisque la Tunisie a été classé premier au monde arabe et en position avancée en Afrique, en matière de fausse facturation, à ce titre.

Sous ce même angle, la Commission économique et sociale des Nations unies pour l’Asie occidentale (CESAO ou ESCWA en anglais), a publié en mai 2018 une étude sur les FFI dans le monde arabe où apparait le mauvais classement de la Tunisie.

Sur le plan international, le phénomène des FFI demeure l’un des défis majeurs du développement puisqu’il représente l’une des formes les plus répandues du blanchiment d’argent. Dans ce contexte, la « Conférence sur les flux financiers illicites et la fausse facturation » organisée par l’Organisation mondiale des douanes (OMD), s’est intéressée à la façon de mieux cerner les mécanismes et autres supports servant au transfert illégal d’argent passant par les transactions commerciales.

Les conclusions de la conférence confirment que, « les principales formes de fausse facturation, qui permettent de faire circuler des flux financiers illicites liés étroitement au blanchiment d’argent, sont la surfacturation des importations en vue de maquiller une fuite de capitaux, la sous-facturation des exportations en vue de dissimuler un profit commercial à l’étranger (dans un pays tiers, par exemple un paradis fiscal) et la surfacturation des exportations en vue de faire entrer des recettes illicites (cachées) dans le système financier national légal ».

Il est clair qu’il s’agit de pratiques internationales qui rendent difficile la mission des organismes de lutte contre de tels phénomènes, par la complexité de leurs ramifications.

Néanmoins, la note de l’OTE indique que d’après l’ESCWA, la Tunisie arrive de loin en tête des pays arabes en termes de flux financiers illicites qui représentent 16,2 % de son commerce extérieur hors produits pétroliers en cumulé.

Rappelons dans ce cadre, que le phénomène de dumping des produits turcs du marché tunisien pourrait dans une large mesure occulter des réseaux mafieux opérant dans les crimes de blanchiment d’argent en se basant sur le jeu de transfert des FFI.

Au fait et en 2020, les importations de produits turcs, selon l’Institut National de la Statistique (INS), sont estimées en valeur à 2588,2 millions de dinars (MD) et sont évaluées en volume 861,8 mille tonnes. Ainsi, chaque kilogramme importé de Turquie coûte 0.33 dinars. En se basant sur ce rapport, les importations turques doivent, dans l’ordre normal des choses, se composer de matières premières, de produits semi-finis pour l’industrie et des biens d’équipement lourds ce qui n’est pas le cas.

Au fait, les produis turcs se composent essentiellement d’habillement, d’articles consommables en plastiques léger, et de certains produits d’usage courant englobant même du papier hygiénique et de l’eau aromatisé. Ces importations révèlent des manœuvres de surfacturation claires et nettes et de fuite de capitaux à très grande échelle. Tout ceci est sans considérer les importations turques qui ne sont pas comptabilisés et qui sont issues de la contrebande organisée.

La lutte contre les flux financiers illicites et le blanchiment d’argent, particulièrement la fausse facturation au niveau du commerce extérieur, permettrait à la Tunisie, selon l’OTE, de réduire sa dépendance aux prêts extérieurs et leurs conditionnalités. Le classement de la Tunisie en tête des pays arabes en termes de flux financiers illicites devrait porter la lutte contre ce fléau en priorité absolue.

 

 

 

 

 

 

 

 

Laissez un commentaire
Publié par
Mohamed Ben Abderrazek