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Canada – Racisme systémique et compétences ignorées : un rapport alerte sur les disparités

Canada – Racisme systémique et compétences ignorées : un rapport alerte sur les disparités

Un récent rapport met en lumière une réalité préoccupante : dans le nord de l’Ontario au Canada, de nombreux immigrants noirs hautement qualifiés se retrouvent contraints d’accepter des emplois bien en dessous de leurs compétences, faute de trouver des postes dans leur domaine.

Le nord de l’Ontario est une vaste région canadienne couvrant environ 90 % de la province d’Ontario. Elle se distingue par ses paysages naturels spectaculaires, comprenant des forêts denses, des lacs immenses et des ressources minières riches. Moins peuplée que le sud de l’Ontario, elle est composée de villes comme Thunder Bay, Sudbury, Timmins et North Bay, et elle attire de plus en plus d’immigrants grâce à des programmes visant à combler les pénuries de main-d’œuvre.

Une communauté en pleine croissance mais sous-employée

Selon le recensement de 2021, plus de 5 000 personnes dans le nord de l’Ontario s’identifient comme noires, soit le double de la décennie précédente. Cette croissance est en partie liée au Programme pilote d’immigration en milieu rural et nordique, lancé pour combler les pénuries de main-d’œuvre. Entre 2017 et 2024, 44 % des répondants au rapport étaient de nouveaux arrivants, avec un pic en 2023.

Malgré une population très éduquée – 53 % des répondants détiennent au moins un diplôme universitaire –, une grande majorité d’entre eux ne travaillent pas dans leur domaine de spécialisation.

Ce décalage, qualifié de “skills-job mismatch”, pousse ces travailleurs à accepter des emplois sous-qualifiés et moins bien rémunérés.

Un marché du travail déconnecté des compétences

Selon Stacey Wilson-Forsberg, chercheuse à l’Université Wilfrid Laurier, bien que les diplômes étrangers soient souvent reconnus en Ontario, les opportunités professionnelles dans les domaines de spécialisation restent rares. “Les secteurs dans lesquels ces professionnels sont formés ne sont pas toujours disponibles localement”, explique-t-elle.

Ce problème est exacerbé par des pratiques discriminatoires, comme l’exigence d’une expérience de travail canadienne, que Wilson-Forsberg décrit comme ayant des “sous-entendus racistes”, notamment à travers des discriminations liées aux accents et aux noms.

Des solutions pour un meilleur usage des talents

Le rapport propose plusieurs recommandations pour résoudre ces inégalités :

  • Supprimer l’exigence d’expérience canadienne dans les offres d’emploi, comme l’a initié l’Ontario avec le Projet de loi 149 en novembre 2023.
  • Renforcer les programmes de transition professionnelle dans les universités et collèges pour permettre aux nouveaux arrivants de travailler rapidement dans leur domaine.
  • Réviser les stratégies des services d’emploi pour éviter de pousser les candidats hautement qualifiés vers des emplois sous-qualifiés.

“Les titulaires de maîtrises ne devraient pas être obligés de cacher leurs diplômes pour travailler dans des entrepôts ou des serres”, dénonce le rapport.

Racisme systémique et perspectives afro-centriques

Le rapport dénonce également le racisme systémique dans des secteurs clés comme l’éducation, l’emploi, et même l’accès au logement. Une attention particulière est portée au secteur de la santé, où les chercheurs recommandent une approche afro-centrique, notamment pour répondre aux besoins croissants de la population noire.

Le Canada connaît un déficit de médecins généralistes, particulièrement dans les régions rurales. Former davantage de professionnels noirs dans une perspective culturelle adaptée est devenu une priorité, selon le rapport.

Un projet de recherche à long terme

Cette étude, la première du genre dans le nord de l’Ontario, ambitionne d’établir une compréhension plus approfondie des défis socio-économiques des communautés noires. À l’avenir, une enquête en français sera menée pour analyser la situation des populations noires francophones, en collaboration avec des associations locales et le Collège Boréal.

Les chercheurs souhaitent également renforcer les liens entre les populations noires et les communautés autochtones de la région, en partenariat avec l’Université Lakehead.

Une mobilisation nécessaire

“Les communautés noires font face à des barrières structurelles disproportionnées”, souligne la chercheuse Rosemary Kimani-Dupuis. “Un plaidoyer collectif est essentiel pour catalyser des changements à travers les systèmes au Canada.”

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