La résistance arabe face aux plans de Donald Trump pour Gaza commence à s’organiser. Il était temps. Les nations arabes, sidérées par l’annonce fracassante de Washington sur la déportation – définitive a finalement précisé le président américain – des Gazaouis, ont rendez-vous ce vendredi 21 février à Riyad, en Arabie saoudite. Sont annoncés les dirigeants des pays du Conseil de coopération du Golfe (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Qatar, Koweït, Oman et Bahreïn), le roi de Jordanie, le président égyptien et l’Irak…
Seules les monarchies du Golfe peuvent stopper Netanyahu
Ils mettront sur la table un programme de reconstruction de l’enclave palestinienne, dévastée à 70% par plus de 15 mois de bombardements. Mais contrairement à la Maison Blanche les pays arabes insistent sur le fait que tous les chantiers seront réalisés sans déplacer la population. L’Egypte avait dit le 12 févier qu’elle a des idées dans ce sens, avec la Jordanie, il s’agit maintenant d’embarquer les richissimes monarchies du Golfe dans ce projet, qu’elles financeront certainement.
La délocalisation des Gazaouis est sur la table depuis janvier 2024, portée par les deux ministres les plus radicaux du gouvernement israélien, ceux de la Sécurité et des Finances. Mais le Premier ministre Benjamin Netanyahu sait qu’à lui tout seul il ne peut pas imposer ses vues à l’Egypte et tous les pays arabes avec lesquels il a normalisé les relations, dans le cadre des Accords d’Abraham. Alors il a fait endosser ce projet à celui qui ose tout, Donald Trump.
Quand il s’est rendu à Washington le 4e février 2025, au lieu d’évoquer la deuxième phase du cessez-le-feu (libération de tous les otages israéliens et retrait total de Tsahal) pour enchaîner avec la troisième étape (un accord de paix et la reconstruction de Gaza), Netanyahu s’est présenté avec son plan de déportation des Palestiniens. Et depuis il multiplie les manoeuvres et cherche le moindre prétexte pour reprendre la guerre qui fatalement fera fuir les Gazaouis.
Gaza s’impose sur l’agenda de MBS, l’investissement de 600 milliards $ attendra
Le Prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salmane (MBS), sans qui rien ne se décide dans cette partie du monde, a été le premier dirigeant étranger à converser avec Trump. C’était le 22 janvier dernier, 12 jours avant l’annonce de la Maison Blanche sur le contrôle de la bande de Gaza et le déplacement de ses habitants vers l’Egypte, la Jordanie et d’autres pays. Le président américain n’a jamais dit lesquels. Ce qu’on sait c’est que les Palestiniens et l’Etat palestinien n’étaient pas au centre de la discussion entre MBS et Trump…
Ils ont surtout parlé gros sous, des investissements saoudiens aux USA de l’ordre de 600 milliards de dollars, un premier paquet dit-on. On n’a pas entendu parler de conditions sur les droits des Palestiniens. Riyad, comme il l’a fait ces dernières années, voulait certainement minorer ce dossier pour avancer sur les siens, Gaza s’est imposé sur son agenda. Et d’ailleurs cette réunion est bien tardive au regard des développements quotidiens sur le terrain.
D’après l’ONU le financement de la reconstruction de l’enclave palestinienne est évalué à 53 milliards de dollars. Le Caire n’a pas officiellement dévoilé son plan ; d’après Mohammed Hegazy, membre du Conseil égyptien des affaires étrangères, un think tank qui a beaucoup de poids, le président Abdel Fattah-al Sissi partirait sur un chantier de 3 à 5 ans. «Pendant la première phase, de six mois […], des équipements lourds déblayeront les décombres et trois zones sécurisées pour reloger les déplacés seront aménagées […]. Des logements mobiles seront fournis», a expliqué l’ex-diplomate.
Un mois de retard, Sommet “d’urgence” disent-ils…
L’Arabie saoudite a indiqué que la réunion de ce vendredi est informelle et a lieu dans «le cadre des relations fraternelles étroites qui unissent les dirigeants (…). Quant à l’action arabe commune et aux décisions prises à son sujet, elles seront à l’ordre du jour du prochain sommet arabe d’urgence qui se tiendra dans la République arabe sœur d’Égypte», a ajouté la même source…
A noter que le Sommet arabe d’urgence était programmé au départ ce 27 février, puis a été renvoyé au 4 mars prochain sans qu’on en sache le motif… Un mois après l’annonce de Trump, on a vu mieux en matière de délai pour un Sommet “d’urgence”. Le moins qu’on puisse dire est que les dirigeants arabes prennent le temps. Alors que «nous sommes à un tournant historique majeur du conflit israélo-arabe ou israélo-palestinien […], où les États-Unis, sous la présidence de Trump, pourraient instaurer de nouvelles réalités irréversibles sur le terrain», a averti Andreas Krieg, du King’s College de Londres.
C’est la réunion «la plus importante depuis très longtemps» dans la région, a-t-il conclu, et il n’a pas tort. L’avenir nous dira si les leaders arabes ont la même perception des événements et surtout s’ils tiennent le choc face à la tornade Trump.
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