Tunisie Numérique s’est penchée sur les habitudes alimentaires des ménages tunisiens qui ont bien voulu partager avec nos journalistes, dans les régions, leurs modes de consommation.
L’initiative, intitulée ‘‘Dis-moi ce que tu manges’’, vise à dépeindre avec authenticité et sans préjugés la manière dont les familles tunisiennes gèrent leur budget alimentaire en période de crise.
Dans un élan de générosité et de transparence, les familles participantes, issues de divers horizons géographiques et socio-économiques de la Tunisie, ont volontairement accepté de révéler les coulisses de leur organisation domestique. Elles ont ouvert les portes de leurs garde-manger et réfrigérateurs, nous permettant ainsi d’observer de près les choix et les sacrifices qu’elles font au quotidien pour nourrir leurs proches.
Daniel, un migrant nigérian de 30 ans, est né à Kano, au nord du Nigéria, dans une famille musulmane traditionnelle. Le Ramadan, chez lui, était un mois spécial, empli de l’odeur du maïs grillé et du “Tofu”, un plat que sa mère préparait. Mais aujourd’hui, en Tunisie, il vit ce mois de manière différente, avec de nouvelles saveurs, bien que l’esprit de ce mois sacré reste intact.
Fuir la pauvreté: Le départ de Daniel vers l’inconnu
Daniel a pris la décision de quitter son pays après avoir entendu parler de compatriotes ayant réussi à atteindre l’Europe via la Tunisie et la Libye. Bien qu’il sache que le voyage serait difficile, la pauvreté et l’absence de perspectives l’ont poussé à tenter sa chance. Il a réuni tout l’argent qu’il pouvait, une somme modeste, à peine suffisante pour franchir la première frontière. Il a embarqué dans un camion bondé, traversant le Niger en direction de la Libye. À chaque étape, il rencontrait des migrants d’autres pays, tous animés par le même rêve. Le trajet a été éprouvant, avec des jours de marche dans le désert et des nuits passées à dormir à la belle étoile.
De la Libye à la Tunisie: Un voyage semé d’embûches
Après des semaines de souffrance, il est arrivé en Libye, mais ne pouvait y rester longtemps. Il a donc décidé de traverser la frontière vers la Tunisie. Avec l’aide de passeurs, il a franchi illégalement la frontière vers la région de Médenine, dans le sud du pays. Là, il a passé quelques jours avant de commencer à chercher du travail. Son objectif était d’atteindre Sfax.
Tataouine, un destin inattendu: Une nouvelle vie au cœur du sud tunisien
Ce que Daniel ne prévoyait pas, c’est que son chemin le conduirait à Tataouine. Un jour, alors qu’il travaillait dans l’agriculture, il a rencontré un migrant nigérian plus âgé qui lui a raconté que la vie à Tataouine était moins difficile que dans les grandes villes et qu’il y avait des opportunités de travail dans les marchés et les chantiers de construction. Il a décidé de le suivre et s’est retrouvé au milieu des travailleurs du bâtiment, des agriculteurs et des vendeurs dans les marchés. Au début, il n’avait nulle part où vivre et a dormi pendant plusieurs semaines dans des chantiers abandonnés ou chez des connaissances. Finalement, après plusieurs mois de travail acharné, il a réussi à louer une petite chambre modeste.
Iftar à Tataouine : Rencontre avec la générosité locale
Avant l’appel à la prière du maghrib, Daniel et son employeur, qui opère dans la friperie, ferment rapidement leur stand, puis se dirigent vers l’une des tables d’iftar au centre-ville. Tandis que l’employeur retourne chez lui, Daniel est accueilli chaleureusement par les bénévoles à l’entrée. Il prend un verre de lait froid et trois dattes, comme il en avait l’habitude dans son pays. Assis à la table, il reçoit une soupe tunisienne chaude, un plat de couscous aux légumes et à la viande, du pain frais, une salade grillée et une portion de tajine. Daniel se souvient de ses repas de rupture du jeûne au Nigéria, où il savourait des plats comme le “Riz wolof” et “Akara” faits à base de haricots, accompagnés de l’eau d’hibiscus froide. Il sourit, réalisant que, malgré les différences dans les mets, l’esprit de solidarité et d’hospitalité, qu’il connaissait bien dans sa communauté, est toujours présent ici, en Tunisie.
Nuits du Ramadan: La prière et la mosquée comme refuge
Après l’iftar, Daniel se rend dans un café pour boire un thé à la menthe, puis il retourne dans sa modeste chambre située dans un quartier populaire. Là, il se repose un peu, et se dirige ensuite vers la mosquée proche pour la prière de tarawih. Il se sent apaisé en écoutant le Coran. Il se souvient de ses prières avec son père et ses frères à la mosquée du quartier à Kano, où les mosquées étaient pleines de fidèles et les invocations résonnaient dans toutes les rues de la ville.
Le sahur : Surmonter la faim et s’adapter à un nouveau quotidien
Lorsque l’aube approche, Daniel se réveille. Après sa première expérience difficile, il a compris que le sahur était essentiel pour survivre à une longue journée de travail dans le marché.
Il achète des aliments pour le sahur, tels que du yaourt, du pain et du lait, dans le magasin du quartier, mais parfois il les reçoit gratuitement de l’association caritative locale ou des habitants qu’il perçoit comme étant plus généreux pendant le Ramadan que le reste de l’année.
Daniel se rappelle du sahur au Nigéria, où il mangeait des plats copieux comme le “Tuwo Shinkafa” (bouillie de riz) et le “Miyar kuka”. Il rit lorsqu’il repense à son premier jour de Ramadan en Tunisie, où il ne s’est pas réveillé pour le sahur et a dû supporter la faim et la fatigue toute la journée. Depuis, il règle son téléphone pour l’alerter quinze minutes avant l’aube, se levant rapidement pour manger ce qui est disponible, boire beaucoup d’eau, puis se rendormir un peu.
Ramadan et solidarité: Trouver du réconfort loin de chez soi
Malgré la distance qui le sépare de sa famille, Daniel trouve refuge dans le Ramadan tunisien, qui lui permet de combler un peu le vide de l’éloignement. Il a trouvé dans la générosité des Tunisiens, dans l’atmosphère chaleureuse des mosquées, et dans l’aide des associations caritatives un soutien précieux durant ces moments difficiles.
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