Paris et Alger n’avaient pas besoin d’un autre motif de discorde, il est bien là pourtant et pas des moindres : l’ancien ministre algérien de l’Industrie Abdesselam Bouchouareb, qui réside en France depuis 2019. Il fait partie des pontes de l’ancien régime – “issaba” – que les autorités et la justice algériennes traquent depuis des années, jusqu’en France, pour récupérer les deniers publics détournés. Bouchouareb a d’ailleurs été condamné à plusieurs reprises pour «corruption» et son pays le veut pour qu’il purge ses peines de prison. La justice française a dit “Niet”…
«Le parquet général a demandé à la cour d’appel d’Aix-en-Provence d’opposer un avis défavorable aux six demandes d’extradition vers l’Algérie d’Abdesselam Bouchouareb, ministre de l’Industrie et des Mines entre 2014 et 2017 sous la présidence d’Abdelaziz Bouteflika», ont rapporté des médias français. «L’éloignement de M. Bouchouareb, gravement malade, ferait courir à celui-ci, si ce n’est un risque de vie, (un risque) de déclin rapide et irréversible de son état de santé», a argué l’avocat général, Raphaël Sanesi de Gentile, cité par les mêmes sources. Il est d’avis que la justice algérienne n’a pas présenté suffisamment de gages de traitement légal de l’ancien ministre…
Questionnées par la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence sur les conditions de détention qui seront appliquées à cet homme de 72 ans, «les autorités algériennes ont évoqué une incarcération au centre pénitentiaire d’El-Harrach, à Alger, dans des “salles de 120 à 145 m2”, sans indiquer le nombre de détenus dans ces salles» a-t-on appris. «J’ai du mal à imaginer qu’il puisse vivre dans une communauté de vie avec une quinzaine de personnes», a commenté l’avocat général. «Plutôt 100 personnes», a répliqué Me Benjamin Bohbot, avocat de Bouchouareb.
Me Anne-Sophie Partaix, Conseil de l’Etat algérien, ne voit pas du tout les choses de la même façon. «Les autorités judiciaires, ont, le 13 février 2025, donné les garanties nécessaires à la justice française (…). M. Bouchouareb a volé de l’argent aux Algériens, il a été condamné et doit répondre de ses actes», a-t-elle martelé…
Pointant un discours «honteux», Me Bohbot dit de son client que c’est une victime des «purges» qui frappent les collaborateurs du défunt président Abdelaziz Bouteflika, poussé à la démission par le mouvement populaire du “Hirak”, en avril 2019. Bouchouareb a soutenu lors de son audition qu’il n’est «pas un voleur mais un grand industriel (…). Mes collègues sont injustement incarcérés car ils ont voulu appliquer la loi».
La chambre de l’instruction donne rendez-vous au 19 mars pour annoncer sa décision. Si elle suit le Parquet général la procédure d’extradition s’arrête net. Inutile de vous dire que les autorités algériennes le prendraient comme une énième bravade de la France, après le tour de vis sur les visas des dignitaires algériens et leur refoulement dans les aéroports français. L’affaire Bouchouareb s’ajoute à une kyrielle de contentieux lourds auxquels s’est ajoutée la reconnaissance par le président français de la marocanité de tout le Sahara occidental.
Parmi les derniers motifs de discorde il y a l’incarcération en Algérie de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Paris est ulcéré par ce dossier et l’argumentaire sur la dégradation de la santé du détenu a certainement pesé lourd dans le refus d’extrader Bouchouareb. Le président Emmanuel Macron a fait un commentaire très acide sur cette affaire, propos qui ont fortement courroucé Alger. Depuis Paris tente de réduire les voiles. Mais voilà, il y a le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, le nouveau porte-voix des algérophobes. Macron l’a recadré publiquement le 28 févier dernier, Retailleau a remis ça à deux reprises, dans deux grands médias.
Le moins qu’on puisse dire est que la déferlante échappe complètement au contrôle du palais de l’Elysée, surtout depuis que le Premier ministre François Bayrou est descendu dans l’arène…
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