On l’avait oubliée celle-là, dans le bouillonnement des élections européennes et législatives. Mais elle est bien là et les étrangers demandeurs de cartes de séjour la vivront dans leur chair. Je parle de la nouvelle Loi immigration, qui a fortement agité l’opinion publique et le Parlement en décembre, jusqu’à provoquer des démissions fracassantes au sein du gouvernement. Jour de gloire ce mardi 16 juillet pour le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui porte à bout de bras ce texte depuis juillet 2022 : Les décrets d’application de la nouvelle réglementation sur les permis de séjour sont parus dans le Journal officiel.
Beaucoup de dispositions de la Loi immigration, des dizaines d’articles jugés discriminatoires et attentatoires aux valeurs de la République, n’ont pas passé le tamis du Conseil Constitutionnel. Mais beaucoup ont survécu et le large sourire de Darmanin au terme du vote à l’Assemblée nationale le présageait. Et d’ailleurs cette loi a permis au ministre d’expulser en un temps record – moins de 24 heures – des imams épinglés pour radicalisme. Avec les nouveaux décrets le premier flic de France pourra faire beaucoup plus. Ça consolera peut-être l’extrême droite, qui vient encore de chuter à une marche du pouvoir.
Très prompt quand il s’agit d’ébruiter des tirs sur ceux jugés indésirables sur le sol français Darmanin a annoncé sur les réseaux sociaux la publication ce mardi matin de «six nouveaux décrets d’application de la Loi Immigration». Ces dispositions viennent se greffer «aux mesures de grande fermeté déjà en vigueur» depuis l’adoption de la Loi immigration le 28 janvier dernier. Pour illustrer «la grande fermeté» décrétée en décembre dernier le ministre indique que «2 500 étrangers délinquants ont été expulsés au premier semestre 2024», un bond en avant de 28%.
Parmi les six décrets d’application officialisés ce mardi il y a le refus de délivrance ou le retrait pur et simple de cartes de séjour aux étrangers qui transgressent «les principes de la République». Avec la Loi immigration, notamment l’article sur les permis de séjours, les étrangers qui déposent des dossiers devront être irréprochables, à tous les niveaux, sinon c’est la porte de sortie. Donc on ajoute des couches au code d’entrée et de séjour des étrangers et du droit d’asile pour «contrôler l’immigration et améliorer l’intégration», assume le décret.
Par ailleurs les autorités ne se satisfont plus de simples engagements verbaux sur le respect des «principes de la République», on parle d’un contrat instauré sur la base de l’article 46 de la Loi immigration. L’article précise les valeurs de la République qui ont été sacralisées : «la liberté personnelle, la liberté d’expression et de conscience, l’égalité entre les femmes et les hommes, la dignité de la personne humaine, la devise et les symboles de la République, l’intégrité territoriale et la laïcité», lit-on dans le journal officiel de la République française.
Ce n’est pas tout, le décret souligne que la signature de ce contrat «conditionne la délivrance du document de séjour», et c’est aussi valable pour les demandes de renouvellement des titres de séjour déjà délivrés. Et le demandeur peut «se voir refuser le renouvellement de son document, ou se le voir retirer en cas de manquement caractérisé à l’un de ces principes», indique la même source. Donc être déjà titulaire d’un titre de séjour valable ne protège de rien, il faudra montrer patte blanche en permanence.
Même les étrangers détenteurs d’un titre de séjour de longue durée ne sont pas épargnés, un nouveau cadre réglementaire et procédural a été aménagé. On peut par exemple citer «la saisine de la commission du titre de séjour pour avis»…
Clairement les autorités mettent la pression sur les étrangers obligés de passer par la case cartes de séjour. Et pour les autres – les binationaux – il y a l’épée de Damoclès de la déchéance de nationalité et elle frappe sans ménagement.
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