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France : L’hôpital public s’est servi de ce psychiatre tunisien durant 2 ans puis la Préfecture l’a jeté et expulsé…

France : L’hôpital public s’est servi de ce psychiatre tunisien durant 2 ans puis la Préfecture l’a jeté et expulsé…

Ces médecins tunisiens qui quittent le pays, par milliers, pour rallier l’Europe, un flux de plus en plus en dense au fil des ans. Ces médecins étrangers sans lesquels les hôpitaux publics français cesseraient de tourner (ils occupent près de la moitié des postes tout de même). Tout le monde se rappelle de la tête qu’a faite le président Emmanuel Macron quand il a découvert cette réalité. Mais la réalité que personne n’exhibe devant les caméras c’est le parcours du combattant pour avoir droit au même traitement (salaire, grade…) que les médecins français, à diplôme égal puisque c’est avec ce même diplôme que les “étrangers” soignent des Français. Les mésaventures de ce psychiatre tunisien démontrent, une fois de plus, que l’herbe n’est pas nécessairement plus verte ailleurs.

Le praticien, qui servait à Millau (sud de la France) depuis 2 ans, a été tout bonnement expulsé du pays en dépit d’une forte mobilisation. Les nombreux patients qu’il prenait en charge, dont des cas graves, comme vous pouvez l’imaginer, sont sans solution. Le Tunisien fait partie des fameux PADHUE (“praticiens à diplôme hors Union européenne”), une armada de 3500 médecins étrangers indispensables pour le système de santé, avec des milliers de patients, des gardes assommantes. En janvier dernier le Premier ministre s’était engagé à régler définitivement les problèmes liés à leur statut, en les régularisant, beaucoup attendent toujours.

Pour le docteur Houcine Turki ce sera carrément l’expulsion, son titre de séjour ayant expiré fin mai dernier le couperet de l’OQTF (obligation de quitter le territoire français) est tombé sur sa tête. L’issue est fatale. Les soignants et les patients ont beau manifester, collecter plus de 15000 signatures en ligne, peine perdue. “J’ai honte“, confie à France inter Corinne Mora, déléguée syndicale CGT de l’hôpital. “D’un côté on nous dit qu’on manque de médecins, et de l’autre, quand on en a, on les expulse. Cela met la population du sud Aveyron en grande difficulté, il y a des ruptures de prise en charge“, a-t-elle ajouté.

Pourtant dès mars 2024 le chef du service de psychiatrie, Jean-Dominique Gonzalez, avait averti les autorités sanitaires sur les terribles conséquences pour les patients. “Je leur disais qu’un certain nombre de patients, 300 à 400, ne pourraient plus être soignés. On m’a répondu, de façon administrative, c’est comme ça, il doit partir (…). Je me suis dit, où on est ? Où va le service public, où va la psychiatrie ? On ne peut pas accepter ça, on est la patrie des Droits de l’Homme, il y un droit aux soins pour tout le monde. Que les tutelles réagissent comme cela, c’est incompréhensible“, dit amèrement Dr Gonzalez.

La préfecture de l’Aveyron, droite dans ses bottes, a rétorqué ceci : “Le praticien étranger exerçant à l’hôpital de Millau est entré en France en 2022 sous couvert d’un visa long séjour ‘étudiant – stagiaire (…). Il a effectué plusieurs périodes de stages à Marseille puis en Aveyron, au titre desquelles il a obtenu plusieurs cartes de séjour à durée temporaire, conformément à la réglementation en vigueur. Celle-ci prévoit en outre que la durée maximum de recrutement au titre de plusieurs conventions de coopération dans un ou plusieurs établissements de santé publics ou privés à but non lucratif est fixée à deux ans, soit jusqu’au 31 mai 2024 pour l’intéressé. Par ailleurs, ce médecin stagiaire ne s’est pas inscrit aux EVC 2023 (épreuves de vérification des connaissances). Dans ces conditions, il ne peut prétendre à une autorisation provisoire d’exercice dans le cadre des dérogations temporaires pourtant mises en place.”

Il ne s’est peut-être pas inscrit aux “épreuves de vérification des connaissances“, il n’avait peut-être pas “une autorisation provisoire d’exercice“, pourtant cela ne l’a pas empêché de traiter un nombre incalculables de patients, comme tous les médecins qui officient dans le public. Comment son administration a pu fermer les yeux sur ça durant 2 longues années ? Allez savoir. Il est très probable que Dr Turki soit un des agneaux que les pouvoirs publics sacrifient dans ce climat délétère où c’est l’extrême droite qui dicte le tempo, alors que le pays n’a jamais eu autant besoin de bras et cerveaux étrangers. Une schizophrénie bien française.

Le psychiatre est rentré au bercail – en Tunisie – le 31 mai dernier. S’il veut retourner en France il n’aura d’autre choix que de passer par la case concours d’équivalence, une absurdité pour un médecin qui a fait ses preuves. Et entre temps Quid des patients ? “Les malades, même les plus graves, vont devoir attendre“, assène un soignant du service…

 

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