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France : Premières reculades de Bardella face aux difficultés, première déception des fans et pas la dernière

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Le futur Premier ministre – ce sont les sondages qui le disent -, Jordan Bardella , a bien compris que piloter le pays ne sera pas un long fleuve tranquille, politiquement, économiquement et même socialement. Les manifestations anti-extrême droite du 15 juin donnent une idée de l’agitation qui attend le Rassemblement national (RN), avec même un risque de fragmentation de la société et de débordements violents. A ajouter aux périls économiques qui guettent, accentués par la situation désastreuse des finances publiques. La dernière sortie de Bardella a des allures de reculade, de débandade face aux montagnes de difficultés qui l’attendent au prochain virage.

Bardella refuse de souffrir comme Macron

 «Je ne serai pas le collaborateur du président». Le jeune président du RN n’ira pas au Premier ministère à n’importe quel prix, il ne se contentera pas d’une petite majorité pour prendre Matignon après le scrutin, il pose comme condition une majorité absolue pour accepter le job. «Si demain les Français plaçaient le pays dans une situation de majorité relative, donc de blocage, alors on ne pourrait pas changer les choses», a-t-il argué ce mardi 18 juin sur Cnews…

«Il y a une occasion historique, mais pour cela j’ai besoin d’une majorité absolue, je ne serai pas le collaborateur du président», a-t-il ajouté.

Ce qu’il veut c’est un groupe de 289 députés à l’Assemblée nationale pour avoir les coudées franches, ce qui est très improbable au regard de la montée en puissance de la gauche, regroupée sous la bannière commune Nouveau Front populaire. Bon, on n’en est plus au front uni anti-extrême droite des années Chirac, l’extrême droite ayant bien cheminé vers sa normalisation, mais il n’est pas exclu que le Parti socialiste, la France insoumise et compagnie fassent un très bon score ce 30 juin.

Bardella assure qu’il se livre à un exercice de «vérité» pour ne pas trahir ses électeurs. «À Matignon, avec l’hypothèse d’une majorité absolue, nous aurons des leviers importants pour agir», défendait-il la veille dans Le Parisien. Il refuse de végéter «dans l’impuissance» en cas de majorité relative. Et de ce point de vue les souffrances de la majorité sortante sont très parlantes. Le président Emmanuel Macron était obligé, sur tous les sujets importants, d’aller un coup vers la droite pour faire voter ses textes au Parlement (Loi immigration, retraites, etc.), et un coup pêcher des voix à gauche…

Les pièges tendus par Macron

D’une certaine façon le chef de l’Etat ne serait pas mécontent de céder les leviers de l’exécutif au RN pour le laisser se dépatouiller avec les patates chaudes (réformes de l’Agriculture, de l’Education, de l’Assurance-chômage…). Et lui se contenterait de glisser des peaux de banane vers l’inexpérimenté Premier ministre, jusqu’à la présidentielle de 2027, une réédition des cohabitations explosives de 1986 (entre François Mitterrand et Jacques Chirac) et 1997 (entre Chirac et Lionel Jospin).

Preuve que l’extrême droite, qui n’a jamais gouverné dans toute l’histoire de la République, commence à prendre la mesure de l’ampleur de la tâche : le RN temporise sur l’abrogation de la fameuse réforme des retraites. Jordan a dit que ce dossier n’est plus une urgence, que l’état des finances publiques ne permettra pas d’enterrer cette loi dès ses premières semaines à Matignon. Alors que c’était une promesse ferme. Le RN est déjà dans les compromis, les compromissions viendront après…

«La réforme des retraites sera abrogée à partir de l’automne», a clamé Bardella hier lundi dans Le Parisien, après des jours de tangage. «Nous verrons», lâchait-il la semaine dernière. Clairement c’est une reculade, ses partisans diront pragmatisme et devoir de vérité. Il faut dire aussi que deux des alliés de Bardella, le président déchu des Républicains, Éric Ciotti et Marion Maréchal – elle aussi virée de Reconquête par Eric Zemmour -, ont défendu la réforme des retraites imposée par le gouvernement Borne.

Ciotti a tendu à Bardella une bouée hier soir dans le 20-Heures de France 2 : «il (n’était) pas dit que la réforme des retraites sera abrogée». Il propose de s’en remettre aux «marges de manœuvre qui seront données» par un audit des finances publiques. Ce serait donc ça la recette miracle pour éviter au RN son premier reniement. Mais là aussi il n’est pas dit que les bonnes surprises escomptées seront au rendez-vous. Incertitude sur le plan politique – si Bardella n’a pas de majorité absolue – plus incertitude sur les grands choix économiques, ça fait beaucoup…

 

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