Cette photo est plus éloquente que tout ce qui a été dit et écrit sur la France d’aujourd’hui : bigarrée, métissée, colorée, n’en déplaise à la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard. Bien entendu tout cela ne va pas toujours de soi, la société se cabre parfois, prise par les convulsions et le passif du passé colonial plus les défis d’un brassage auquel beaucoup d’esprits n’étaient pas préparés. Mais c’est le pays dans lequel ils vivent, c’est le monde dans lequel on vit. Accepter l’inéluctable, l’accompagner, l’organiser facilitera les choses. Je le dis pour ceux que cette réalité rebute, dérange, heurte.
Ce tableau est celui d’un service des urgences dans un hôpital de l’Oise (Hauts-de-France), très certainement un hôpital public. Un de ces endroits que les médecins français désertent, à cause des conditions de travail, du sous-équipement, de la violence physique et morale qui y sévit, de la cadence infernale des gardes, du manque de reconnaissance du travail des praticiens, etc. C’est cela et rien d’autre qui contraint les autorités à faire appel à ces médecins étrangers que vous voyez sur ce tableau.
Cette réalité beaucoup de Français ne veulent pas la voir en face, un déni trempé dans une mauvaise foi qui se nourrit de raccourcis, de préjugés, d’idées reçues. C’est très confortable pour certains, de plus en plus nombreux, une posture qui empêche de réfléchir sur les causes profondes de la présence de tous ces professionnels que la France fait tout pour attirer. Ils ne sont pas là par hasard, certains se sont démenés pour qu’ils viennent.
On les a invités à entrer, la moindre des choses serait qu’on les accueille comme il se doit, au lieu de ces éruptions racistes, xénophobes et islamophobes décomplexées, assumées jusqu’au sommet de l’Etat. Une schizophrénie qui ne fait pas du bien au pays, qui le rend malade, dangereusement. Cette réalité le président Emmanuel Macron l’a vue quand il a fait une virée dans un de ces hôpitaux publics très représentatifs de la France d’aujourd’hui…
Il a vu tous ces médecins algériens, tunisiens, marocains, sénégalais, etc. Il les a regardés dans les yeux. Le chef de l’Etat n’avait certainement pas idée de l’ampleur du “phénomène”, il ne savait certainement pas à quel point les hôpitaux dépendent de ces bras et cerveaux étrangers. Macron ne tombe pas du ciel, c’est un Français comme tous les autres, mais lui ce qu’il a retenu c’est que ces gens sont là pour apporter leur pierre à l’édifice. Point barre. Tout le monde devrait le voir sous cet angle.
L’an dernier 3800 médecins sur 4000 recrutés en France étaient des étrangers hors Union européenne (UE). Et la vague est continentale : l’UE a un déficit de 1,2 million de professionnels de la santé et les cherche activement. C’est cela la réalité, celle que se garde d’évoquer l’extrême droite et la droite dure, parce qu’elle ne fait pas les affaires de leur tambouille électorale. “Trop d’étrangers en France” est plus facile à vendre que “la France a besoin des étrangers“.
Plus vite cette réalité s’installera dans les esprits, plus vite la société vaincra ses démons. Autrement ce sera un long et douloureux combat contre un état de fait et au bout il n’y aura aucun vainqueur, que des pays perdants. C’est la France toute entière qui perdra.
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