La France, qui est la seule puissance militaire de l’Union européenne (la seule dotée de l’arme nucléaire), sera sans doute la grande gagnante du recentrage sur une vraie Défense européenne, en achetant européen. Enfin, si les Européens tiennent leurs engagements dans la durée. Par son comportement erratique et ses coups de canif sur le Pacte de l’OTAN le président Donald Trump a terrifié les Européens. Ils ne peuvent plus s’appuyer aveuglément sur les équipements et le soutien américain. Le Portugal a été le premier à annoncer qu’il ferme la porte des fameux avions de combat américains F-35, la Grèce lui emboîte le pas mais cette fois sur les missiles.
Athènes a paraphé avec Paris ce lundi 14 avril un accord pour l’acquisition de 16 missiles antinavires Exocet. Ce contrat entre dans le cadre d’un partenariat militaire plus large entre les deux pays et qui monte en puissance depuis 2021, date à laquelle les Grecs ont misé sur les chasseurs Rafale et les frégates Belharra français. Le ministre grec de la Défense, Nikos Dendias, scellera cet accord avec son homologue français Sébastien Lecornu.
«On vient de signer un accord entre États pour la fourniture de 16 missiles Exocet» du missilier européen MBDA, a indiqué Dendias lors d’une conférence de presse commune avec Lecornu à Athènes. Il n’a pas livré plus d’indications sur ce marché.
Rappelons que la France et la Grèce avaient conclu en 2021 un partenariat stratégique dans la défense et la sécurité. Athènes avait commandé 24 appareils Rafale puis 3 frégates de défense et d’intervention (FDI) dénommées Belharra, pour un montant global de plus de 5,5 milliards d’euros. Les deux nations avaient évoqué dans la foulée une option pour l’achat d’une quatrième frégate et le ministre français a confié ce lundi que «le dossier de la quatrième frégate avance».
«Nous avons déjà une coopération étroite qui comprend les 3 Belharra et une discussion autour de l’acquisition d’une quatrième», a corroboré le ministre grec. A noter que ce dernier avait déjà fait savoir vendredi dernier, lors d’une intervention au Forum économique de Delphes, que «dans nos intentions, il y a l’acquisition d’une quatrième frégate (…). Elle fait partie de notre plan d’armement»…
«Cette quatrième frégate […] aura des armes stratégiques, c’est-à-dire des missiles de croisière», avait-il ajouté.
D’après une source au sein de Naval Group approchée en mars dernier, la France a proposé à la Grèce de lui fournir 3 FDI supplémentaires qui seront fabriquées dans les chantiers navals grecs, une manière pour l’industrie de défense locale de se bonifier grâce à des transferts de technologie.
Par ailleurs le ministre grec de la Défense a évoqué vendredi dernier des pourparlers sur «la possibilité d’acquérir […] deux frégates italiennes d’occasion».
La Grèce, membre de l’OTAN, a officialisé le mois dernier le démarrage de la révision des fondements de l’armée, «la plus importante» de son histoire moderne. Une enveloppe de 25 milliards d’euros sera affectée à ce chantier. Paris pourrait se tailler la part du lion au rythme où vont les choses. On verra ce que fera Washington pour accrocher le wagon grec et tous les autres dans ce contexte de renforcement de la sécurité européenne…
Le secrétaire d’Etat américain Marco Rubio a fait le déplacement lors de la dernière réunion de l’Alliance pour annoncer qu’il n’a jamais été question pour les USA de larguer leurs alliés européens. Tous les gens sérieux savaient que Washington a laissé courir le bruit pour terrifier les Européens afin qu’ils plient face à une exigence de Trump : Consacrer 5% de leurs PIB à la Défense, en achetant américain évidemment.
Sauf que la terreur est tellement montée en Europe qu’ils se sont dit que les Etats-Unis ne pouvaient plus être considérés comme cet allié fiable qui a protégé et couvé depuis la Première Guerre mondiale. Trump est annoncé au Sommet de l’OTAN en juin prochain, à La Haye (Pays-Bas), on peut compter sur lui pour tout tenter afin de convaincre les Européens que ses équipements militaires sont la solution…
Les Européens devront résister aux sirènes du républicain et à la tentation d’enterrer leur projet de Défense pour retourner sous le parapluie troué des Américains. Le président Emmanuel Macron devra faire des étincelles pour arrimer les Européens – surtout ceux de l’Est et les Allemands, très “américanophiles” – à l’offre française en matière d’équipements militaires. Paris a tout pour séduire mais il ne faut pas minorer la puissance de la diplomatie américaine.
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