Longtemps considérées comme l’actif le plus sûr du monde, les obligations d’État américaines – ou bons du Trésor – traversent aujourd’hui une crise de confiance inédite.
Depuis le retour aux affaires de Donald Trump, ses choix économiques, fiscaux et géopolitiques ont déstabilisé les marchés mondiaux, générant une flambée des taux d’intérêt et un mouvement de désengagement massif des investisseurs vis-à-vis des actifs américains.
Le retour des droits de douane élevés – notamment une taxe de 10 % sur les importations britanniques et 145 % sur les produits chinois – a ravivé les craintes inflationnistes. Les investisseurs anticipent des hausses de prix et exigent donc des rendements plus élevés pour compenser la perte de valeur liée à l’inflation.
Le désengagement des États-Unis des accords commerciaux et la remise en question de l’ordre économique mondial ont affaibli la crédibilité de Washington. Résultat : la confiance dans la capacité de l’Amérique à honorer ses dettes s’effrite, même sur le long terme.
L’accumulation des hausses tarifaires se traduit mécaniquement par une hausse des prix à la consommation, ce qui accentue les craintes de stagflation (inflation + ralentissement économique), un cauchemar pour les investisseurs obligataires.
Pour contenir l’inflation, la Réserve fédérale relève les taux d’intérêt, rendant les anciennes obligations moins attractives. Cela fait chuter leur valeur sur le marché secondaire, provoquant une hausse des rendements.
Des signes clairs d’essoufflement économique apparaissent : baisse du pouvoir d’achat, hausse du coût du crédit, ralentissement des entreprises… autant d’indices annonçant un risque de récession renforcé.
Les décisions politiques imprévues de l’administration Trump ont miné la confiance des investisseurs, poussant à un retrait massif des capitaux étrangers et nationaux.
Le déficit fédéral explose : la dette américaine a franchi les 36,2 trillions de dollars fin février 2025, soit 123 % du PIB. Le seul paiement des intérêts dépasse désormais 1 000 milliards de dollars par an, avec une hausse annuelle de 240 milliards.
Et ce n’est pas fini :
8 000 milliards de dollars de dettes devront être refinancés d’ici fin 2025
2 000 milliards supplémentaires devront être levés pour financer le déficit courant
Chaque point de hausse de rendement équivaut à des dizaines de milliards de dollars supplémentaires en charges d’intérêts, pesant lourdement sur les budgets de l’éducation, de la santé, de la défense et de la sécurité sociale.
Japon : 1 079,3 Mds $
Chine : 760,8 Mds $
Royaume-Uni : 740,2 Mds $
Arabie saoudite : 126,9 Mds $
Émirats arabes unis : 92,6 Mds $
Koweït : 49,2 Mds $
Ces pays voient la valeur de leurs portefeuilles baisser à mesure que les rendements montent et que le dollar se déprécie. Certaines nations pourraient être forcées de liquider une partie de leurs bons du Trésor, aggravant la crise.
Face à des rendements américains élevés, les investisseurs se retirent des marchés émergents, provoquant :
Crises de liquidité
Hausse du coût du financement
Gel des projets d’infrastructure
Turbulences monétaires
La montée des rendements et la chute des actifs américains reflètent une rupture de paradigme historique : la finance mondiale ne considère plus l’Amérique comme un modèle de stabilité. Pire : le marché obligataire américain est devenu un facteur de risque systémique.
À cela s’ajoute une hausse des incertitudes politiques, l’absence de réformes structurelles, une polarisation intérieure accrue, et une dépendance grandissante à la dette.
Le danger n’est plus hypothétique : des fermetures gouvernementales, comme en 2011 ou 2013, sont de plus en plus probables, mais dans un contexte économique beaucoup plus fragile.
Si l’administration américaine ne modifie pas rapidement sa trajectoire budgétaire et commerciale, les conséquences seront multiples :
Perte de confiance durable
Chute du dollar comme devise de référence
Recomposition de la hiérarchie financière mondiale
Des puissances émergentes comme la Chine, l’Inde ou des blocs comme les BRICS pourraient profiter du vide laissé par les États-Unis pour redéfinir un nouvel équilibre monétaire international.
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