Est-ce que Washington l’a fait sciemment pour se venger de Paris, porte-drapeau des pays de l’Union européenne dans leur combat sur les droits de douane ? Mystère total. Ce qui est certain c’est que la France fait partie des grands perdants de la modification de l’indice américain de sécurité pour les voyages. Le changement a eu lieu hier mercredi 9 avril et la France, pays le plus visité du monde, a perdu du galon, elle est maintenant au 2e rang, rapporte Bloomberg…
L’Hexagone passe après le Salvador, qui décroche la note 1, la meilleure. Pour l’administration de Donald Trump les touristes américains prennent moins de risques en se rendant dans ce petit pays d’Amérique centrale qu’en visitant la France, le Royaume-Uni ou l’Italie, tous logés dans la catégorie d’alerte 2. Le président du Salvador, Nayib Bukele, qui rend beaucoup de services aux USA, s’est réjoui de la nouvelle.
Au sujet de la France, le site Travel.State.Org, administré par le département d’État américain, demande aux touristes de faire preuve de la plus grande vigilance du fait des “périls terroristes” qui peuvent “attaquer des sites touristiques, des plateformes de transport, des marchés, centres commerciaux…“. C’est totalement surfait, fantasmé avec une bonne dose de mauvaise foi, surtout sachant ce que font les armes à feu aux USA.
Pour le Salvador Washington est plus beaucoup plus magnanime. Il se borne à recommander à ses ressortissants de “prendre leurs précautions habituelles” en cas de voyage. En novembre dernier le pays de Bukele était déjà passé du niveau 3 au niveau 2, puis au niveau 1 le 9 avril 2025. Dans son communiqué l’administration Trump argue une nette amélioration de la situation sécuritaire au Salvador : “L’activité des gangs a diminué au cours des trois dernières années. Cela a entraîné une baisse des crimes violents et des meurtres“.
C’est vrai factuellement, mais de là à le faire passer avant la France c’est un peu fort ! Il y a à peine 5 ans le Salvador était classé parmi les pays les plus dangereux au monde, il est devenu l’un des endroits les plus sûrs du continent. Tout a changé depuis 2019, avec l’arrivée de celui qui revendique le statut de “dictateur cool”. Face à l’explosion des crimes de sang Bukele a mis en place en mars 2022 une politique de “tolérance zéro” contre la délinquance, et tant pis pour l’État de droit…
L’homme assume l’arrestation arbitraire de dizaines de milliers de personnes sur la base d’un simple soupçon d’appartenance à un gang. Un témoignage ou même un tatouage suffisent pour vous envoyer derrière les barreaux. La police et l’armée ratissent tellement large que le pays a vite battu tous les records en matière de population carcérale. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir un taux d’homicide supérieur à celui de la France : 1,9 mort pour 100 000 habitants, contre 1,2 dans l’Hexagone. Alors qu’est-ce qui justifie que Washington fasse cette fleur à Bukele ?
Une partie de la réponse est dans la fournée de 200 prisonniers vénézuéliens expulsés par Trump et que le Salvador a accepté de “sous-traiter” dans ses prisons haute sécurité flambant neuves. Le président Bukele est attendu à la Maison-Blanche ce 14 avril pour sans doute négocier d’autres faveurs, après les 10% de taxes douanières – le seuil le plus bas – que lui ont accordé les Etats-Unis. La sécurité des Américains n’a pas de prix.
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