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Maroc : un Tsunami sociétal, les couples non mariés ont le champ libre dans les hôtels

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Dans un pays – le Maroc – travaillé par les pratiques religieuses, parfois très discutables et qui doit en même temps donner des gages d’ouverture, de modernité vu le poids du secteur touristique dans l’économie il n’est pas facile de faire mouvement sur les questions sociétales. Toutes les décisions doivent être savamment pesées pour épargner les susceptibilités des courants d’opinions, même si quoi qu’on fasse à l’arrivée on heurte toujours la conscience de certains. Mais le royaume chérifien n’est pas le seul dans ce tourbillon, ses voisins aussi et les pays arabo-musulmans en général sont bousculés par des impératifs contradictoires. Les autorités marocaines en ont rajouté une louche à l’inconfort des pays voisins en prenant la décision de supprimer la présentation de l’acte de mariage pour accéder aux hôtels, même pour les couples marocains.

C’est un vieux tabou qui saute : désormais les couples non mariés ont le champ libre dans les hôtels du pays. Avant même que le Parlement ne débatte de la question la police de Rabat a demandé aux hôteliers de ne plus exiger l’acte de mariage aux couples ou aux femmes seules qui viennent pour réserver, a rapporté le site marocain Le360 dimanche dernier. La même instruction aurait été donnée aux établissements hôteliers de la ville de Fès.

Les partis modernistes souhaitaient trancher définitivement la question à l’Assemblée nationale, mais même sans l’aval des législateurs le patron de la police à toute latitude pour acter la levée de l’interdiction. Car dans les faits aucune loi n’interdit formellement aux couples non mariés d’occuper la même chambre à l’hôtel, rappelle le journal en ligne. C’est une règle informelle qui a fini par être érigée en dogme légal qui s’est imposé à tous et que personne n’avait osé contester. Il faut croire que les temps ont changé…

D’après l’avocate et militante Ghizlane Mamouni, citée par la même source, en l’absence de texte légal, les autorités ont laissé les hôtels agir à leur guise pour limiter le plus possible l’infraction de relations sexuelles hors mariage, laquelle par contre est sanctionnée par le Code pénal. La police a pris les devants alors que le sujet est inscrit à l’ordre du jour du Parlement, et justement le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, est attendu par la Commission de la justice, de la législation et des droits de l’Homme.

Ce sont les députés de la majorité, du Rassemblement national des indépendants (RNI), du Parti authenticité et modernité (PAM) et du Parti de l’Istiqlal, toutes des formations modernistes, qui ont proposé cette séance, guettée par les islamistes du PJD (Parti Justice et développement). Mais Ouahbi avait annoncé la couleur le 21 mai 2024 en disant au Parlement que la présentation d’un acte de mariage dans les hôtels est une mesure «discriminatoire», qu’elle n’a “aucune base légale” et que c’est une «violation flagrante des droits de la femme».

Toutefois il n’est pas dit que le débat est clos au sein de la société marocaine, loin de là. Même ceux qui prônaient la fin de ce tabou montre des signes de fébrilité face au chemin qui reste à accomplir. L’avocate Ghizlane Mamouni a par exemple déclaré qu’il ne faut pas s’emballer, que c’est une «demi-mesure» ; selon elle le vrai écueil c’est l’article 490 du Code pénal qui criminalise les relations sexuelles hors mariage…

«On ouvre la voie à d’autres moyens de lutter contre cette infraction», ajoute Maître Mamouni. Elle est d’avis que cette mesure «fragilise les hôteliers» et leur renvoie la patate chaude, étant donné que s’il est établi que des relations sexuelles hors mariage ont eu lieu dans leurs établissements c’est sur eux que s’abat la sanction pénale.

Par ailleurs selon le site Hespress les hôtels 4 et 5 étoiles ne sont pas emballés par cette mesure, ils redoutent que des clients se présentent avec des prostituées, ce qui nuirait à leur réputation, sans parler des foudres de la Justice. Quand on vous disait que le débat n’est pas clos…

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