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Par Hédi Sraiëb : Ce que j’aurais recommandé au futur chef de gouvernement

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Le constat général d’essoufflement de notre modèle de développement est quasi-unanime. Seuls diffèrent les diagnostics et par là, les dispositions susceptibles tout à la fois de reconstruire la confiance dans les institutions et de présenter les contours d’une perspective nouvelle, économiquement plus viable, socialement plus juste et écologiquement soutenable. A cet effet, il convient d’articuler fortement actions prioritaires et mesures-points d’appui de transformation de la structure économique et sociale.

1- Dans le climat délétère généralisé qui règne singulièrement dans le monde du travail, l’organisation d’une grande conférence nationale sur l’emploi et les droits sociaux qui réunirait, les fédérations professionnelles des deux centrales syndicales et autres groupements professionnels, permettrait d’avancer, sans le recours de L’Etat, sur de nombreux et possibles compromis (modération salariale,annuellement du temps de travail, limitation du travail temporaire, sécurité sociale professionnelle adossé à un nouveau dispositif de formation professionnelle et qualifiante, codécision sur les questions ayant trait à l’organisation du travail: pénibilité, santé).

2- Faire adopter une loi de programmation de relance du secteur des phosphates

Rappelons, à toutes fins utiles, que lorsque cette activité atteint son optimum de production, ses excédents couvrent à eux seuls, la totalité des déficits du secteur public. Une nouvelle direction indépendante du pouvoir central doit disposer d’un budget pluriannuel lui permettant de restructurer l’activité, diversifier ses productions, et de construire des partenariats autour de biens communs spécifiques au territoire (recyclage et gestion des eaux, -ONAS-SONEDE, reboisement, plantes aromatiques et médicinales)

3- Transférer à l’Etat les dettes des entreprises publiques (STEG, SONEDE) afin de leur restituer des marges de manœuvre qu’elles n’ont plus et leur permettre d’enclencher plus rapidement leur reconversion dans les énergies nouvelles et la maîtrise de la gestion de l’eau. Une loi PPP spécifique adossée à une garantie de l’Etat et une bonification de taux d’intérêt pourrait accélérer cette reconquête des biens communs vitaux en attirant le savoir-faire de grands industriels internationaux.

4- Réorganiser le commerce extérieur et ses prolongements sur le marché intérieur

La logique du tout « laissez-faire, laissez-passer » a conduit à déséquilibrer puis à déstabiliser l’intégralité des structures de l’appareil de production et de distribution. Franchises, Grandes surfaces, Malls commerciaux, s’ils bénéficient à une frange de la population, sont voraces en devises  (royalties, dividendes, prix de transfert) et sont aussi un non-sens d’autant que dans les pays développés c’est le cheminement inverse qui s’opère (commerce de proximité, relocalisation, e-commerce).

Il ne s’agit pas d’interdire, mais de geler à terme puis prioriser, suite à une négociation, les flux d’importations de manière à permettre au secteur manufacturier (figé et inchangé depuis 3 décennies) de reprendre sa course vers une production à plus forte valeur ajoutée (bio industries, agro-bio, pharmacopée, industries de l’information).

5- Recentrer la politique monétaire et bancaire sur la création d’emploi

Les prérogatives de la BCT qui consistent à maîtriser l’inflation et à assurer la solvabilité extérieure du pays doivent être complétées par une mission de soutien actif à la création d’emploi (comme cela est le cas dans les statuts de la FED ou ceux de l’Old Lady). Pour ce faire, la BCT pourrait mettre en place une politique de différentiation des taux d’intérêt s’appuyant sur des priorités retenues. On oublie un peu vite que si la BCT est indépendante, elle est aussi un agent-instrument d’Etat.

Il ne s’agit là que de mesures phares dont l’importance ne se réduit pas à leur effet performatif mais qui ont aussi un puissant effet symbolique qui tranche avec la gestion de la quotidienneté inchangée, les demies mesures, les ménagements en tous genre, les atermoiements de toutes ces dernières années !

Hadi  Sraieb, Docteur d’Etat en économie du développement.   

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Publié par
Tunisie Numérique