Par Jawhar Chatty : La Cité de Kais Saïd

« Au bout du compte, le Parti annoncera que deux et deux font cinq et il faudra bien l’accepter. Il le fera tôt ou tard, la logique de sa position l’exige. Ce que sa philosophie nie tacitement, ce n’est pas simplement la validité de l’expérience mais l’existence même d’une réalité extérieure. L’hérésie suprême, c’est le sens commun. »…1984, Georges Orwell .

Avertissement : Ici, la réalité dépasse la fiction.

D’abord les faits :

1. Ici, c’était un grand Projet d’une Cité idéale en devenir après une décennie de grande décadence en tout et à tous les étages
2. Le dit grand Projet s’est très vite mû en Projet de Cité citadelle avec Château et intendances
3. Ici, tous les pouvoirs s’équilibrent, mieux, ils se renforcent mutuellement en convergeant tous vers un seul lieu de Pouvoir
4. Le Parlement est déjà là depuis quelques mois et il n’a encore rien produit qui ferait avancer un peu vers la Cité idéale
5. L’inflation est insoutenable

Voilà pour les faits.

Le point 5 est particulièrement intéressant. Plus les prix flambent, plus les gens de la Cité ricanent gentiment. Une résilience et un degré de  servitude à inscrire dans les annales. Passé le difficile cap du Ramadan et de l’Aïd , ils  se sentent étrangement revigorés , prêts et  d’ores et déjà va-t-en guerre à l’approche de l’été, des vacances…

L’hérésie suprême, c’est le sens commun.  La fuite en avant.

Rached Ghannouchi, le grand gourou qui a été le maître absolu du pays douze ans durant est aujourd’hui en prison. Passé le grand émoi à l’annonce de son arrestation, peu de gens s’en émeuvent aujourd’hui et s’en soucient Il était un temps, le temps tunisien de l’élite hypocrite et mercantile qui se reconnaîtra,  le temps des courbettes où s’afficher avec RG était un grand honneur. Dans cet immense marécage de compromissions de  jeunes politiques à l’ambition débordante se sont salis les mains. Je n’en dirais pas plus ici.

Beaucoup seraient prêts à aller lui cracher à la figure au cas où il venait à l’idée des Autorités de l’exposer   sur la place publique …. Les plus fidèles de ses fidèles n’ont du reste pas manqué de le faire.

Le peuple ne pense pas mais il a cette inouïe capacité de discernement, ce moment de lucidité qui a la puissance d’une grande vague, d’un tsunami.

Le président Kais Saïd devra anticiper cette vague et écouter les gens de sa Cité. Les gens de la Cité sont  souvent hors sol, il ne faudrait tout de même pas que le Chef le soit exagérément plus qu’eux …

Jawhar Chatty