Peut-on parler de “tiers-monde” en 2024 ?

1. D’où vient l’expression « tiers-monde » ?

L’expression « tiers-monde » est apparue dans les années 1950. Elle a été créée par l’économiste français Alfred Sauvy en 1952 pour désigner les pays qui ne faisaient partie ni du bloc capitaliste (le « premier monde ») ni du bloc communiste (le « deuxième monde ») pendant la guerre froide. L’idée était de faire référence au « tiers-état » de la Révolution française, c’est-à-dire une partie de la population qui ne bénéficiait ni du pouvoir ni des richesses, mais qui aspirait à l’émancipation et à l’équité. Le « tiers-monde » regroupait alors les pays souvent issus de la décolonisation, confrontés à de grands défis économiques, politiques et sociaux.

2. Qu’est-ce que le premier monde, le deuxième monde, et le tiers-monde ?

Pendant la guerre froide, le monde était divisé en trois grandes catégories :

• Le premier monde : les pays développés, généralement occidentaux, alignés sur les valeurs capitalistes et démocratiques. Il s’agissait principalement des États-Unis, de l’Europe de l’Ouest, du Canada, du Japon, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande.
• Le deuxième monde : les pays communistes ou socialistes, alignés sur l’Union soviétique. On y retrouvait notamment l’URSS, la Chine, et les pays d’Europe de l’Est.
• Le tiers-monde : tous les autres pays, souvent caractérisés par une situation économique défavorable, des défis politiques, et en majorité situés en Asie, en Afrique et en Amérique latine.

Cette division du monde reflétait les réalités géopolitiques de l’époque, mais elle ne prend plus en compte la diversité et la complexité des situations actuelles.

3. Quand apparaît le tiers-monde ?

Le concept de « tiers-monde » s’est imposé dans les années 1960 et 1970, période marquée par les luttes de décolonisation et l’indépendance de nombreux pays en Afrique et en Asie. Les pays du tiers-monde étaient alors majoritairement agricoles, disposaient de peu d’industries, et présentaient des niveaux de vie très bas. Cette période a également été caractérisée par la création d’organisations internationales comme le Mouvement des Non-Alignés, qui cherchait à défendre les intérêts des pays en voie de développement en dehors de l’influence des grandes puissances.

4. Pourquoi ne dit-on plus « tiers-monde » ?

Dans les années 1980 et 1990, le terme « tiers-monde » a progressivement perdu sa pertinence. Plusieurs raisons expliquent ce changement :

• Évolution économique : certains pays initialement qualifiés de « tiers-monde », comme la Chine, l’Inde ou le Brésil, ont connu une croissance économique spectaculaire, accédant ainsi au statut de « pays émergents ». Cette évolution a remis en question la pertinence de l’appellation « tiers-monde », devenue trop homogène.
• Inégalités internes : beaucoup de pays du « tiers-monde » présentaient des réalités très différentes les unes des autres. Il est aujourd’hui plus courant de parler de « pays en développement » ou de « pays du Sud » pour englober les situations diverses.
• Concept dépassé : le terme « tiers-monde » véhicule une connotation péjorative, associée à la pauvreté et au sous-développement. Les expressions actuelles, comme « pays en développement » ou « économies émergentes », sont jugées plus adaptées pour représenter la diversité des trajectoires et des défis de ces pays.
• Nouvelles approches : la perspective « Nord-Sud » est désormais privilégiée pour aborder les inégalités mondiales, reconnaissant que des pays développés côtoient des régions en difficulté, et inversement.

5. Existe-t-il encore des pays du tiers-monde en 2024 ?

En 2024, l’utilisation de l’expression « tiers-monde » est de moins en moins courante. Aujourd’hui, les pays sont plutôt classés en fonction de leur niveau de développement humain (IDH), de leur PIB, de leur indice de pauvreté, et de leur situation économique globale. L’Organisation des Nations unies (ONU) et d’autres organisations internationales préfèrent parler de « pays les moins avancés » (PMA) pour désigner les nations qui présentent les indicateurs socio-économiques les plus bas.

En 2024, on parle davantage de « pays en développement », de « pays du Sud » ou de « pays à revenu faible ou intermédiaire ». Des pays comme le Bangladesh, le Rwanda ou le Vietnam, qui étaient autrefois associés au « tiers-monde », connaissent aujourd’hui une croissance économique et sociale soutenue. Cependant, d’autres pays continuent de faire face à des défis importants tels que la pauvreté, l’instabilité politique, les conflits armés ou le changement climatique.

6. Les défis contemporains des pays en développement

Aujourd’hui, les pays anciennement regroupés sous le terme de « tiers-monde » sont confrontés à des défis variés :

• Accès à l’eau potable et à l’énergie : dans certaines régions d’Afrique et d’Asie, des millions de personnes n’ont toujours pas accès à des services essentiels.
• Éducation et santé : des progrès significatifs ont été réalisés, mais les disparités restent importantes.
• Développement durable : la question de l’utilisation des ressources naturelles, de la transition énergétique et du changement climatique est centrale.

Conclusion : un concept à réviser

En 2024, le terme « tiers-monde » ne reflète plus la complexité et la diversité des réalités que vivent les pays autrefois regroupés sous cette appellation. L’usage de termes comme « pays en développement », « pays du Sud » ou « économies émergentes » permet de mieux saisir la diversité des situations et des trajectoires. Les inégalités persistent, mais les défis ont évolué, et il est essentiel d’aborder ces questions avec des outils d’analyse plus nuancés, tenant compte des contextes actuels. Ainsi, parler de « tiers-monde » en 2024 revient à simplifier une réalité bien plus riche et complexe.

 

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