L’économiste Mourad Hattab met en garde contre les défis structurels qui freinent la relance du secteur du phosphate en Tunisie. Dans une déclaration récente à Mosaïque FM, il a insisté sur l’urgence d’une réforme en profondeur, affirmant que les efforts déployés jusqu’ici n’ont pas permis d’améliorer significativement la situation.
Depuis 2011, douze conseils ministériels ont été consacrés au phosphate et 105 mesures ont été adoptées pour tenter de revitaliser ce secteur stratégique. Pourtant, ces initiatives n’ont pas suffi à redresser la production ni à assurer une exploitation optimale des ressources. Pour Hattab, il est crucial d’adopter de nouvelles méthodologies et des solutions adaptées, sans lesquelles le phosphate ne pourra pas devenir une source stable de devises pour l’économie tunisienne.
Parmi les principaux freins au redressement du secteur, la masse salariale constitue un problème majeur. Le secteur emploie actuellement 30 000 personnes, un effectif jugé disproportionné par rapport aux besoins réels et à la productivité du domaine.
“Le secteur ne pourra se redresser tant que l’on maintient une charge salariale aussi lourde, dont une grande partie ne contribue ni à la rentabilité ni aux revenus de l’entreprise”, a déclaré Mourad Hattab. Il souligne ainsi la nécessité de repenser la gestion des ressources humaines et d’optimiser les effectifs afin d’améliorer la compétitivité.
Selon l’économiste, la Tunisie continue d’utiliser des méthodes d’extraction obsolètes, ce qui réduit la productivité et compromet la compétitivité du secteur à l’international. Pour pallier ce retard, il recommande l’adoption de nouvelles technologies, permettant un meilleur rendement et un coût de production réduit.
L’une des principales recommandations de Mourad Hattab concerne la valorisation du phosphate avant exportation. Il rappelle que le phosphate brut n’est pas une richesse en soi et que son exportation sans transformation représente un manque à gagner considérable pour l’économie nationale.
“Exporter nos ressources à l’état brut, qu’il s’agisse du phosphate ou de l’huile d’olive, constitue une perte colossale pour la Tunisie. Nous devons investir dans des industries de transformation locales respectant les normes environnementales et sociales”, affirme-t-il.
Le gouvernement tunisien affiche des ambitions fortes pour le secteur, avec l’objectif de quintupler la production de phosphate d’ici 2030 afin de renforcer les finances publiques. Toutefois, selon Hattab, cette expansion ne pourra porter ses fruits qu’à condition de mettre en place des réformes structurelles profondes, adaptées aux exigences du marché international.
Pour que le phosphate devienne un véritable moteur de croissance, la Tunisie doit donc adopter une stratégie globale, intégrant modernisation technologique, rationalisation des coûts et transformation locale. Autant de défis à relever pour assurer un avenir pérenne à ce secteur clé de l’économie nationale.
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