Pour le président américain, Donald Trump, tous les moyens sont bons pour tenir les promesses faites à ses électeurs. Là en l’occurrence il s’est adossé sur une loi de temps de guerre datant du XVIIIe siècle pour expulser vers le Salvador plus de 200 membres présumés du gang vénézuélien Tren de Aragua. Leur détention dans une prison de haute sécurité a été officialisée hier dimanche 16 mars par le président Nayib Bukele, le pire ennemi des grands criminels.
Des défenseurs des droits humains avaient déposé un recours auprès d’un juge fédéral américain contre cette loi de 1798, qui a servi pour la dernière fois durant la Seconde Guerre mondiale pour interner des Japonais. Le magistrat avait ordonné samedi dernier un gel de 14 jours de toute expulsion. Le verrou vient de sauter. La Maison-Blanche a argué hier dimanche que les 3 avions transportant les membres du gang, classé “organisation terroriste” par Washington, étaient déjà partis quand la décision de justice est tombée…
“Le gouvernement n’a pas +refusé de respecter+ une décision de justice. Cette décision, qui n’a pas de fondement légal, a été rendue après que les terroristes étrangers du TdA (Tren de Aragua) ont été éloignés du territoire“, a martelé la présidence américaine dans un communiqué.
Vrai ou faux ? Trump a-t-il sciemment piétiné une décision de justice ? Aucune certitude à ce stade. En tout cas le président Bukele lui jubile. “Oups… trop tard“, a-t-il posté hier dimanche, avec un émoji qui pleure de rire, pour répliquer à un article sur la décision prise par la justice américaine.
Le président salvadorien a annoncé le débarquement dans son pays d’un “premier groupe de 238 membres de l’organisation criminelle vénézuélienne Tren de Aragua” et de leur incarcération au Centre de détention pour terroristes (Cecot), prison de haute sécurité inaugurée fin janvier 2023 dans le cadre de sa “guerre” sans merci contre les groupes criminels.
D’après un responsable de la Maison Blanche cité par le Washington Post, 137 prisonniers ont été expulsés sur la base de la loi de 1798, sur un total de 261 personnes. Dans des vidéos et photos mises en ligne uniquement par le gouvernement salvadorien, des soldats réceptionnent à l’aéroport les prisonniers et les font monter, enchaînés, dans des autocars. A genoux dans un hangar, on leur a par la suite rasé le crane. Leur long calvaire commence. Les prisons américaines sont “une partie de plaisir” à côté de ça.
“Merci au Salvador et en particulier au président Bukele pour votre compréhension de cette situation horrible“, a commenté Trump sur son réseau Truth Social. Le président américain a paraphé l’arrêté d’expulsion vendredi dernier mais ne l’a officialisé que samedi. Il justifie son ordre d’expulsion par le fait que Tren de Aragua “menait une guerre irrégulière contre le territoire des Etats-Unis, à la fois directement et sous la direction, clandestine ou non, du régime de Maduro“.
Cette mesure scelle le sort de tous les membres du gang, “passibles d’une interpellation, détention et expulsion immédiates“. Le Venezuela n’est pas content, il fustige une décision du gouvernement américain qui “criminalise de façon infâme et injuste la migration vénézuélienne“. Le président Nicolas Maduro, qui a eu les pires relations avec le démocrate Joe Biden, a caressé Trump dans le sens du poil après son élection en novembre dernier. Il a proposé d’enterrer la hache de guerre, le républicain vient de lui répondre.
L’organisation de défense des droits humains ACLU et Democracy Forward avaient saisi un tribunal de district de Washington pour bloquer les expulsions, en arguant que la loi de 1798 ne devait pas être appliquée en temps de paix. Democracy Forward est d’avis que samedi a été un “jour horrible dans l’histoire de la nation, lorsque le président a rendu public le fait qu’il cherchait à invoquer des pouvoirs extraordinaires en l’absence de guerre ou d’invasion“.
Le secrétaire d’Etat américain, Marco Rubio, a expliqué hier dimanche qu’en plus des détenus du Tren de Aragua, les USA avaient rapatrié 23 membres du gang salvadorien MS-13 au Salvador pour y être jugés.
A noter que Tren de Aragua a vu le jour en 2014 dans la prison vénézuélienne de Tocorón. Il est mouillé dans des meurtres, des enlèvements, des vols, du trafic de drogue, la prostitution, les extorsions et la traite d’êtres humains. Son sinistre business s’est propagé dans plusieurs pays du continent américain, dont les Etats-Unis.
3 pays d’Amérique centrale – le Guatemala, le Panama et le Costa Rica – ont finalement plié pour le retour des migrants expulsés par Washington, mais le Salvador est le seul à prendre en charge les détenus, parmi les plus dangereux du monde. Mais Bukele sait y faire, pour le plus grand malheur de ceux qui tombent entre ses mains…
Laissez un commentaire