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Trump tombe le masque au Congrès : il ne frappe pas à cause du fentanyl, il étrangle pour l’argent

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Inflexible sur les droits de douane, au motif que les partenaires étrangers profiteraient trop des largesses du pays de l’oncle Sam. C’est ce que le président américain, Donald Trump, a martelé hier mardi 4 mars au Congrès. Il s’est engagé à rendre le pays plus fort, plus riche à court terme, et dans son approche très simpliste cela passe par des taxes tous azimuts sur tout ce qui entre aux USA. Des caisses pleines avec l’argent du commerce, payer le prix fort pour avoir le droit de vendre sur le marché américain. Mais Trump a admis devant les élus que son pays payera aussi pour ce tour de vis. Par ailleurs il y a ce que le président américain ne dit pas, pour que ça ne soit pas perçu comme un aveu de faiblesse…

Le bâton puis la carotte

Pendant que Trump prend le Mexique et le Canada à la gorge, pourtant deux partenaires clés pour l’économie américaine, il entrouvre la porte du dialogue sur les droits de douane. Le président américain sait que les consommateurs, les producteurs agricoles et les entrepreneurs de son pays trinqueront aussi, mais il poussera au maximum la confrontation pour soutirer le maximum. Trump a envoyé le secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, pour agiter discrètement un petit drapeau blanc.

Le responsable a déclaré sur Fox Business qu’il a «échangé au téléphone avec les Canadiens et les Mexicains toute la journée (…). Le président est à l’écoute (..) Je pense qu’il finira par trouver une solution avec eux». Il pense qu’une décision pourrait tomber dès ce mercredi. Pourtant dans la même journée Trump avait menacé de serrer encore plus sur les importations canadiennes si Ottawa prenait des mesures de rétorsion. Lutnick a rangé ce ton guerrier. La carotte et le bâton quoi.

Le président américain a déclaré dans la soirée devant les élus du Congrès que les droits de douane allaient «rendre les Etats-Unis de nouveau riches et grands. Cela va se produire et même plutôt rapidement», tout en reconnaissant qu’il y aurait «quelques perturbations, mais nous sommes d’accord avec ça». Cela confirme que cette histoire de laxisme dans le combat contre la drogue qui décime la jeunesse américaine, le fentanyl, n’est pas la vraie motivation de Trump, il veut avant tout se faire se faire beaucoup d’argent.

Reste les «perturbations» dont il a parlé. C’est ce qui se produit au Canada depuis le début du mois dernier, suite à l’appel du Premier ministre Justin Trudeau. Ce dernier a invité ses concitoyens à consommer local, à bouder les produits américains, ce qui a de sévères contrecoups chez les producteurs du pays voisin. Le gouvernement canadien avait promis dès janvier 2025 qu’il répliquerait énergiquement à toute montée des taxes de la part de Washington, c’est ce que Ottawa est en train de faire.

Quid de l’ampleur de la riposte des adversaires ?

Les nouvelles barrières douanières américaines ciblant le Canada, le Mexique et la Chine ont commencé à sévir depuis hier, haussant sensiblement les tarifs des biens qui passent par les frontières. Avocats, t-shirts, voitures, etc., deviennent plus chers. Les importations provenant du Canada et du Mexique sont dorénavant taxées à hauteur de 25%, et 10% pour les hydrocarbures canadiens.

Le Canada a réagi avec l’instauration «immédiate» de droits de douane de 25% sur certains produits américains, notamment la viande, les oeufs, les fruits et le vin. Trudeau a averti qu’il n’en restera pas là, d’autres frappes sont prévues durant ce mois de mars. Lors de sa conférence de presse le Premier ministre canadien a accusé le président américain de fomenter le crash de «l’économie canadienne» pour après «parler d’annexion» du pays.

La marchandise chinoise est soumise à des droits de douane additionnels de 20%, par rapport au niveau appliqué avant le retour de Trump à la Maison Blanche. Là aussi Pékin a riposté hier mardi avec des taxes de 10 et 15% sur une kyrielle de produits agricoles importés des USA dont le poulet, le soja, etc. Sauf que ces représailles ne sont pas de la même ampleur que l’attaque américaine laquelle touche la totalité des produits chinois commercialisés aux Etats-Unis.

La présidente du Mexique, Claudia Sheinbaum, a aussi annoncé des représailles «douanières et non douanières». Elle dévoilera dimanche prochain la palette des mesures de rétorsion, après avoir conversé avec le président américain, «probablement jeudi».

Trump n’en a pas fini avec ceux qu’il rackette…

La réaction assez timorée du Mexique et de la Chine démontre que Trump a encore la main dans cette méga partie de poker menteur, à l’échelle de la planète. Reste à savoir jusqu’où il peut pousser ses pions, jusqu’où il peut malmener Wall Street, qui a bouclé une deuxième séance en net repli. De toute évidence le président américain inquiète les milieux financiers, terrifie les hommes d’affaires qui l’ont porté au pouvoir et subventionnent généreusement les élus républicains.

La Maison-Blanche n’en a pas terminé, d’autres taxes sur les importations américaines sont sur la table, notamment sur l’acier et l’aluminium. Puis viendront l’automobile, les médicaments, les semi-conducteurs, les produits de l’exploitation forestière et de l’agriculture, etc. L’Union européenne prépare aussi la contre-attaque, le président français l’a redit le 28 février dernier au Portugal.

Face aux inquiétudes provoquées par ces escalades commerciales le secrétaire au Commerce a dit ceci sur la chaîne CNBC : «Comme le président l’avait indiqué pendant la campagne, il y aura peut-être des variations de prix à court terme, mais à long terme ce sera complètement différent (…). On aura la meilleure Amérique possible, un budget équilibré, les taux d’intérêt plongeront».

Eponger le déficit public inédit du pays, quelque 31 400 milliards de dollars, pour quoi pas, mais à quel prix ? Nous verrons bien…

 

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