Spécialisé dans l’étude des sociétés anciennes à travers l’Afrique méditerranéenne et le Sahara, Giulio Lucarini, Senior Researcher à l’Institut des sciences du patrimoine du Conseil national de la recherche italien a publié sur le site theconversation.com les résultats d’une étude sur les génomes anciens (séquences complètes d’ADN) de neuf individus ayant vécu au Maghreb oriental entre 15 000 et 6 000 ans. L’objectif de l’étude était de retracer les lignées génétiques et d’identifier les liens ancestraux dans cette région.
L’équipe de recherche a travaillé sur avec des génomes anciens extraits de squelettes humains conservés dans les collections de musées ou d’institutions patrimoniales. Ils proviennent de fouilles effectuées sur quatre sites : Afalou Bou Rhummel, Djebba, Doukanet el Khoutifa et SHM-1 (Hergla), tous situés en Tunisie et en Algérie.
Les analyses révèlent qu’il y a environ 7 000 ans, certains individus étudiés avaient des ancêtres agriculteurs européens. Les Européens ont apporté quelques gènes à la région, mais pas plus de 20 % par individu.
Selon l’auteur, il s’agit d’une influence génétique modeste par rapport aux anciennes populations du Maghreb occidental où, sur certains sites, l’ascendance des agriculteurs européens peut atteindre jusqu’à 80 %.
Les résultats suggèrent que l’introduction des économies vivrières dans l’est du Maghreb ne résulte pas d’un remplacement massif de population, comme ce fut le cas en Europe. Au contraire, le changement s’est opéré progressivement, porté par des migrations sporadiques, des brassages culturels et la transmission des savoirs.
Dans son article, Giulio Lucarini a indiqué que l’une des découvertes les plus fascinantes a été la trace génétique de chasseurs-cueilleurs européens trouvée chez un individu de Djebba, en Tunisie, datant d’environ 8 000 ans et cela suggère que les premières populations européennes et nord-africaines ont pu interagir par le biais de routes maritimes traversant le détroit de Sicile.
Et d’ajouter que la découverte en Tunisie d’obsidienne (verre volcanique) provenant de Pantelleria, une petite île située dans le détroit de Sicile, renforce le lien entre les rives septentrionale et méridionale de la Méditerranée.
“Dans l’ensemble, l’étude révèle une région marquée par une grande résilience génétique et culturelle, en parfaite cohérence avec les données archéologiques”, affirme le chercheur italien.
Notons que cette étude est le fruit d’une collaboration entre les institutions suivantes : l’université de Harvard, États-Unis ; l’Institut Max Planck, Allemagne ; le Conseil national de la recherche italien (CNR) ; l’Institut national du patrimoine (INP), Tunisie ; le Centre national de recherche préhistorique, anthropologique et historique (CNRPAH), Algérie ; l’Institut de paléontologie humaine (IPH), France ; l’Université de Vienne, Autriche ; l’Université La Sapienza de Rome, Italie ; et l’ISMEO – Association internationale d’études méditerranéennes et orientales, Italie.
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