Journaliste, écrivaine et militante des droits des femmes, Fawzia Talout Meknassi retrace, dans son ouvrage Brises et vents, Marocaines engagées, un siècle de luttes pour l’émancipation féminine au Maroc.
Nominée au prix Nobel de la paix en 2008 et reconnue par l’ONU, elle met en lumière des parcours inspirants et analyse les défis qui restent à relever pour les femmes marocaines aujourd’hui.
Un combat toujours inachevé
Dans son livre, Fawzia Talout Meknassi évoque les mouvements d’émancipation féminine au Maroc et revient sur l’histoire du mouvement Akhawat Essafa, actif dès 1946, qui portait déjà des revendications similaires à celles que l’on retrouve aujourd’hui. Pourtant, elle constate que, contrairement à l’époque, les luttes actuelles ne bénéficient plus du même soutien des nationalistes ni des institutions académiques comme l’université Al Quaraouine.
« Nous n’avons pas réussi à mobiliser les hommes pour notre cause d’égalité et de justice », regrette-t-elle, pointant du doigt un manque d’engagement global dans la société pour assurer l’égalité entre hommes et femmes.
Trente portraits de militantes engagées
L’ouvrage est structuré en deux parties : une analyse historique et une galerie de 30 portraits de militantes qui ont marqué le combat pour les droits des femmes au Maroc. L’auteure explique que ses choix sont subjectifs mais motivés par son expérience et son admiration pour ces femmes.
« J’ai choisi parmi les centaines de femmes que j’ai rencontrées celles qui m’ont le plus marquée », précise-t-elle. Elle y met en avant des figures aux parcours divers, engagées dans des causes variées telles que l’éducation, les droits des femmes en milieu rural, la lutte contre le viol conjugal ou encore l’accès aux métiers traditionnellement réservés aux hommes.
Hommage à Colette Amram, une militante discrète mais influente
Parmi ces portraits, celui de Colette Amram se distingue. Moins connue que d’autres militantes marocaines, elle a pourtant joué un rôle clé dans la communication et les relations publiques.
« Colette avait un charisme exceptionnel et un savoir-faire qu’elle partageait avec générosité », raconte Fawzia Talout Meknassi. Son engagement, loin des projecteurs, explique peut-être pourquoi son nom est aujourd’hui moins cité dans l’histoire des luttes féminines marocaines.
L’indépendance économique des femmes : un levier essentiel
L’auteure insiste sur un point clé : l’indépendance économique est un levier fondamental pour l’émancipation des femmes. Pourtant, elle estime que les politiques publiques ne font pas assez pour soutenir les 275 000 artisanes marocaines réparties sur les douze régions du pays.
« Leur travail pourrait être un atout économique majeur, mais il reste sous-exploité », déplore-t-elle. Elle appelle à mieux intégrer ces travailleuses à l’économie nationale afin de valoriser leur contribution et garantir leur autonomie financière.
Une nouvelle génération engagée, mais différemment
Si les jeunes militantes poursuivent aujourd’hui les combats d’antan, elles adoptent une approche plus globale, centrée sur les droits humains et la justice sociale plutôt que sur une revendication strictement féministe.
« Les réseaux sociaux vont transformer le militantisme », explique-t-elle, notant que les nouvelles générations utilisent ces outils pour faire entendre leurs voix de manière plus large et inclusive.
Préserver la mémoire des militantes marocaines
Fawzia Talout Meknassi regrette que la mémoire des luttes féminines marocaines reste peu valorisée. Pour y remédier, elle appelle les universitaires et chercheurs à s’intéresser davantage aux figures féminines ayant façonné le Maroc moderne.
« Il faudrait documenter ces parcours et rendre hommage aux militantes encore en vie », insiste-t-elle. Son livre se veut ainsi un premier pas vers une meilleure reconnaissance de ces femmes qui, par leurs actions, ont contribué à bâtir le Maroc d’aujourd’hui.
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